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La difficile omniprésence des pompiers à temps partiel

le mercredi 02 mars 2016
Modifié à 0 h 00 min le 02 mars 2016
Par Valérie Gagnon

vgagnon@gravitemedia.com

«On est tout le temps à l’écoute», dit Mark-Érick Théberge, lieutenant à la caserne de Sainte-Martine depuis 25 ans.

Le premier feu que ce pompier à temps partiel a combattu était une grange enflammée. Il était âgé de 20 ans et pompier que depuis deux mois. C’est l’influence de son père qui l’aurait poussé à se porter volontaire.

La réalité de pompier est parfois troublante, soutient Mark-Érick Théberge, puisqu’à certains moments, les sapeurs peuvent être en contact avec des corps inanimés. «C’est tous des fantômes qui nous restent dans la tête. […] Nous, ici, on s’en parle entre nous pour faire sortir le méchant», confie-t-il. À travers ces expériences éprouvantes, le lieutenant se charge de renverser la vapeur de triste événement en positif et d’y voir une opportunité d’apprentissage. Les interventions peuvent arriver à toute heure du jour sans compter les activités municipales et de sensibilisation.

«Si j’étais payé pour toutes les heures que je passe à la caserne, je n’aurais pas besoin de mon travail principal», confie celui qui occupe aussi le poste de préposé aux télécommunications à la Sûreté du Québec. Et dans la vie de tous les jours? «Ça fait partie de ma vie. Nous on aime ça, on veut être au courant […] en même temps, elle qui est couchée à côté et qui veut dormir parce qu’elle travaille le lendemain matin; elle ne veut pas entendre tout ça [signaux radio]», dit-il. Les membres de la famille d’un pompier font beaucoup de sacrifices, rapporte-t-il. Son plus gros événement; la crise du verglas de 1998. Celui qui a transmis la passion d’être pompier à Mark-Éric Théberge est Denis Lauzon, directeur du service incendie de Lac-Mégantic qui a dû gérer l’accident ferroviaire de juillet 2013, ancien pompier de Sainte-Martine.

Valoriser le temps plein

Est-ce difficile de recruter des pompiers? «Je dirais que oui, c’est beaucoup d’investissement de temps», répond le sapeur invétéré. Les recrues doivent suivre une formation de base obligatoire de 255 heures offerte par l’École nationale des pompiers du Québec, soutient Patrick Lalonde, président d’ICARIUM Groupe Conseil en gestion de l’urgence. «Après cette formation, les gens s’attendent à un emploi», dit-il. La certification de pompier un permet la pratique à temps partiel, mais le temps investi est profitable seulement pour quelques interventions pour un modeste salaire au cours de l’année, rend-il compte. La conciliation travail-famille et les horaires atypiques qu’exige l’engagement au poste de pompier volontaire représentent des obstacles au recrutement. L’enjeu de la migration des jeunes vers les centres urbains est aussi à considérer, observe M. Lalonde. Malgré ces facteurs, les municipalités de plus de 5000 habitants devraient avoir plus de pompiers à temps plein, selon ce dernier.

«Des recherches effectuées en laboratoire ont démontré que, de nos jours, les incendies de bâtiment prennent moins de 10 minutes pour atteindre le stade de l’embrasement généralisé comparativement à 30 minutes dans les années 1970, et ce à cause des matériaux utilisés dans la construction des maisons et dans la confection des meubles s’y trouvant. Seuls des pompiers physiquement en caserne peuvent intervenir dans un délai aussi rapide et ainsi empêcher la perte entière du bâtiment», révèle-t-il.

Les pompiers en chiffres

70

À Châteauguay, la caserne comprend 70 pompiers dont, 35 à temps plein, 19 à temps partiel et 15 sur appel qui sont affectés à Saint-Isidore.

32

À Mercier, le service des incendies est constitué de 32 pompiers à temps partiel si tous les postes sont comblés. La Ville est présentement en recrutement pour deux postes de pompiers. Deux cadres temps plein et quatre à temps partiel sont dans l’équipe.

31

À Sainte-Martine, le service regroupe 24 pompiers à temps partiel, sept officiers et six pompiers recrutés en formation.

34

À Beauharnois, 26 pompiers à temps partiel, quatre lieutenants, un capitaine, un chef aux opérations forment l’équipe. Pour les effectifs à temps plein sur appel, un directeur et un préventionniste sont disponibles.

25

À Kahnawake, 22 pompiers à temps partiel et 3 à temps plein font partie du service des incendies mohawk.

19

À Saint-Urbain-Premier, 19 pompiers à temps partiel sont en poste. La municipalité est en période de recrutement.

19

À Léry, l’équipe est formée de deux lieutenants, un lieutenant éligible et 16 pompiers à temps partiel.

 

Trois solutions pour faciliter le recrutement

-Offrir des emplois de pompier à temps plein afin d’accroître le retour sur investissement de la formation obligatoire.

-Offrir aux nouveaux pompiers des incitatifs pour aller s’établir en région. Par exemple : En Europe, des subventions pour les logements sont attribuées aux nouveaux pompiers pour s’établir en région rurale.

-Mieux vendre le métier aux jeunes hommes, aux femmes et aux immigrants.

(Source : Patrick Lalonde, président d’ICARIUM, groupe conseil en gestion de l’urgence)

 

Accès pour postuler en ligne bientôt

Selon Martin Argouin, coordonnateur en prévention en sécurité incendie à la MRC de Beauharnois-Salaberry, il serait difficile de recruter de nouveaux pompiers. Pour faciliter le recrutement, la création d’un formulaire pour postuler en ligne est en cours.