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COVID-19

« Bob » accroche ses ciseaux à cause de la COVID-19

le vendredi 19 juin 2020
Modifié à 13 h 55 min le 19 juin 2020
Par Valérie Lessard

vlessard@gravitemedia.com

Après 35 ans de coiffure, c’est le cœur gros que Robert «Bob» Laplante a accroché ses ciseaux. Ce perfectionniste dans l’âme ne voyait pas comment il pourrait offrir un service à la hauteur de ses attentes avec les contraintes sanitaires liées à la COVID-19. Il a donc décidé de mettre fin à sa carrière. Bob Laplante ne s’imaginait pas que le 11 mars 2020 serait sa dernière journée de travail dans son salon de barbier à Châteauguay. À ce moment, on commençait à parler sérieusement du virus de la COVID-19. Ayant des symptômes de rhume, il avait choisi de prendre une journée de maladie, chose qu’il ne faisait pratiquement jamais. «C’était la première fois dans ma carrière que je me disais que j’étais mal à l’aise d’aller travailler parce que je mouchais ou j’éternuais», explique-t-il. Quelques jours plus tard, le gouvernement du Québec exigeait la fermeture de toutes les entreprises non essentielles. Comme bien des entrepreneurs, cette mesure drastique a été difficile pour le coiffeur d’expérience. «La COVID-19 m’a donné une claque. Je travaille en moyenne 13 heures par jour. Quand tu te fais arrêter d’un coup sec c’est difficile. Je n’ai pas eu de diagnostic officiel, mais je pense que j’ai fait une mini dépression», raconte-t-il. Lorsque le gouvernement a annoncé que la réouverture des salons de coiffure serait possible avec des contraintes sanitaires telles que le masque, la visière et une désinfection accrue des installations, Bob Laplante s’est mis à douter d’un retour au travail. Avec 500 clients qui le suivent depuis près de 15 ans dans son salon privé, il savait qu’il ne serait pas en mesure d’offrir le service à toute sa clientèle. «Je me sens un peu mal parce qu’il y a des commerces qui vont fermer parce qu’ils n’auront plus de clients. C’est un peu ridicule parce que mon problème c’est que j’en aurais comme trop», confie-t-il. Il était impensable pour lui d’avoir à sélectionner une seule partie de sa clientèle. Le fait qu’il soit asthmatique a aussi pesé dans la balance. Le barbier a donc fait l’annonce à ses clients par écrit qu’il mettait fin à sa carrière. «J’ai l’impression que c’est comme si j’avais laissé ma blonde par texto, illustre-t-il. J’avais besoin d’un peu de recul, je vais prendre le temps de tous les contacter par téléphone.» Une relève familiale [caption id="attachment_84634" align="alignnone" width="444"] Bob Laplante en compagnie de sa fille Chanel qui poursuivra le travail au salon Chez Bob Barbershop avec son frère Dylan.[/caption] Les réactions ont été nombreuses à la suite de cette annonce. La fille de Bob, Chanel Laplante, qui travaille au salon avec son frère Dylan depuis quelques années, en a aussi eu des échos. «Il y a des clients qui nous écrivaient mon frère et moi parce que non seulement ils perdaient leur barbier, mais aussi leur confident. Pour des clients qui viennent aux quatre semaines, c’est quasiment une rupture pour eux», raconte-t-elle. Le salon Chez Bob Barbershop sur la rue Principale à Châteauguay survivra malgré le départ de son fondateur, grâce aux enfants de celui-ci. Ils pourront servir une partie de la clientèle de leur père, mais pas tous étant donné qu’ils ont chacun leur propre liste de clients. Chanel Laplante est émotive à l’idée de perdre un de ses partenaires de travail. «C’est mon père, on a partagé la même passion ensemble. C’était vraiment cool de faire ça avec lui, souligne-t-elle. Je veux vraiment faire honneur à ce qu’il a bâti.» Parmi les valeurs importantes de Bob Laplante, il y avait celle de traiter chaque client « comme si c’était sa vedette préférée». La relève Laplante entend bien poursuivre cette tradition. Le Soleil de Châteauguay a parlé à cette famille quelques jours avant la réouverture officielle des salons de coiffure qui avait lieu le 11 juin. Chanel Laplante était très excitée à l’idée de recommencer à coiffer malgré les contraintes sanitaires. «Mon frère et moi on est allés faire nos commissions la journée où on a appris qu’on pouvait recommencer. On bookait nos rendez-vous et on était excités», dit-elle. Quant au papa, il ne sait pas encore comment il occupera ses journées. «Je ne sais pas ce que l’avenir me réserve. C’est la première fois de ma vie que je ne travaille pas», conclut le Châteauguois de 50 ans. [caption id="attachment_84638" align="alignnone" width="444"] Chanel Laplante présente son nouvel uniforme de coiffure: sarrau, masque, visière et même une lumière frontale pour bien voir les détails pendant la coupe.[/caption]