chronique
Opinion

La grosse misère blanche

le lundi 20 mars 2017
Modifié à 0 h 00 min le 20 mars 2017
Par Michel Thibault

mthibault@gravitemedia.com

Le bilan de la tempête de la semaine dernière est catastrophique.

Des gens sont morts dans leur voiture ensevelie. Quelques centaines ont passé de longues heures d’angoisse, leur véhicule enlisé sur une autoroute. Ou encore dans une rue pas loin de chez eux.

À mon humble avis, il y a une grande leçon à tirer de nos déboires avec cette bordée. Chausser des pneus d’hiver avec pictogramme de flocon du 15 décembre au 15 mars ne nous immunise pas contre la paralysie automobile.

Comme quelques millions de fourmis peuvent terrasser un éléphant, des trillions de flocons savent arrêter un camion de 53 pieds, on l’a vu. Il y a une limite à ce qu’un anneau de caoutchouc peut mordre.

À la difficulté pour une roue de se frayer un chemin dans un mètre de neige, s’ajoute l’aveuglement provoqué par la poudrerie. Au pire de la tempête, mercredi, la visibilité était nulle sur la plupart des routes. Qu’est-ce qu’on y faisait ?

À l’annonce de la tempête, les commissions scolaires ont prévu fermer les écoles. Une très sage décision considérant les conditions routières dangereuses anticipées.

Mais pourquoi ferme-t-on seulement les écoles quand une perturbation majeure menace ?

Il y a quelques années, j’étais en vacances en Caroline du Sud. Un ouragan s’est annoncé. Par mesure de sécurité, le monde s’est arrêté de tourner. La zone où on était a été évacuée. À quelques heures de l’arrivée de «Charlie», il n’y avait plus personne dans les rues. Chacun s’est trouvé un abri. Personnellement, je me suis risqué à l’extérieur. Un policier m’a interpellé et ordonné de rentrer à la maison. «Sinon, j’ai une place pour toi. C’est dangereux de rester dehors», il m’a dit.

Pourquoi, nous, quand une méga tempête plane, on continue notre train-train comme si de rien n’était ?

J’ai croisé une dame de Beauharnois, mercredi matin, qui se désolait de devoir se rendre au travail à La Prairie. En route, elle est restée prise avec sa voiture et elle a elle-même aidé deux automobilistes confrontés au même enlisement. «Les employeurs devraient nous donner congé», elle a jugé.

Je seconde sa proposition. On devrait suivre l’exemple de nos voisins du Sud. À l’approche d’une tempête majeure, la circulation devrait être interdite. Sauf pour les véhicules de déneigement. Tout le monde étant en congé, le nettoyage des rues serait plus efficace. Aussi, chacun pourrait s’occuper de nettoyer sa propre cour avec moins de stress.

Je ne pense pas que les employés qui ont souffert dans le trafic ou qui ont pelleté deux heures avant de se rendre au boulot ont été des plus productifs.

Ce n’est pas normal, quand «notre pays c’est l’hiver», qu’une tempête nous plonge dans la grosse misère blanche.