Opinion

La légalisation de la prostitution n'est pas la solution

le jeudi 27 février 2020
Modifié à 9 h 26 min le 27 février 2020
Par Valérie Lessard

vlessard@gravitemedia.com

Dans le cadre de sa chronique judiciaire et d’actualité du 5 février dernier, Monsieur Claude Poirier aborde le décès de Marylène Lévesque, jeune femme assassinée présumément par Eustachio Gallese en mettant de l’avant l’importance de légaliser «le travail du sexe» afin d’assurer la sécurité et la vie des femmes qui sont dans cette industrie. Pour le Centre d’Aide et de Lutte contre les Agressions à Caractère Sexuel (CALACS) Châteauguay, la prostitution n’est pas un travail au même titre qu’un autre. Elle constitue d’abord et avant tout une forme de violence et d’exploitation sexuelle des filles et des femmes en contexte de vulnérabilité. Faut-il rappeler que depuis 2014, le fait d’acheter ou de tenter d’acheter des services sexuels, en quelque lieu que ce soit, à une personne de tout âge, représente une infraction au Code Criminel? Cet acte a été classé comme une « infraction contre la personne », ce qui signifie qu’il s’agit d’un acte de violence. La légalisation de la prostitution est loin d’être un gage de protection et de sécurité pour les femmes dans l’industrie. Elle ne permet pas de filtrer qui sont les «bons» et les «mauvais » clients. Elle ne ferme pas la porte au proxénétisme, en fait, elle créée un proxénétisme d’État. Elle ne fait pas en sorte non plus que les femmes présentes dans l’industrie sont exemptes de violence. A-t-on oublié que les pays qui ont légalisé la prostitution se retrouvent avec un taux élevé de trafic humain, plus précisément de jeunes filles mineures et qu’une majorité de ces femmes vivent sans statut légal, ce qui les expose à une grande vulnérabilité ? Le fait de «travailler» dans des maisons closes, un salon de massage, un appartement n’est pas nécessairement plus sécuritaire. La situation de Madame Lévesque en témoigne, elle qui «travaillait» dans un milieu supposément « sûr et sécurisé ». Aussi, la comparaison entre la légalisation du cannabis et celle de la prostitution est franchement révoltante. En quoi le fait de permettre à des personnes de s’acheter en toute légalité une substance à fumer est-elle comparable au fait d’acheter ou de consommer le corps des femmes pour des services sexuels? C’est justement cette banalisation qui entraine une conception inhumaine et dégradante du corps de la femme et qui la confine à un objet sexuel. Comment pouvons-nous considérer l’exploitation sexuelle comme étant défendable socialement sachant que l’âge d’entrée en prostitution est de 14-15 ans et que ce sont la majorité d’entre elles qu’on retrouve en tant qu’adultes dans l’industrie? Et que dire des femmes racisées qui se trouvent en contexte de prostitution de manière disproportionnée car elles sont victimes de racisme et de discrimination? Que dire des femmes autochtones surreprésentées dans ces milieux et qui subissent les répercussions du colonialisme de plein fouet? La prostitution est encadrée par une loi; l’échec à faire respecter cette loi contre les proxénètes, les bordels et les clients, fait en sorte que les femmes prostituées resteront extrêmement vulnérables à la violence des hommes. C’est pourquoi nous souhaitons l’application de la loi, afin d’assurer la sécurité et l’intégrité de toutes les femmes, spécialement celles dans l’industrie du sexe. 10-4