chronique

Lever du jour rose

le mardi 31 mars 2020
Modifié à 11 h 19 min le 01 avril 2020
Par Michel Thibault

mthibault@gravitemedia.com

Le soleil s'est levé vers 6h30 le 31 mars en pyjama à rayures rose et gris. Spectacle grandiose en ce dernier jour de mars, Mars, qui, on le sait, est le dieu de la guerre, opposant cette fois les humains à la COVID-19. Mars 2020 historique où un être microscopique a changé complètement la face du monde. Ça me rappelle un conte de mon enfance : Les maîtres de la forêt. Les magasins fermés le dimanche me ramènent aussi loin en arrière comme le mot «shutdown». «La semaine prochaine je vais être en shutdown.» Ça voulait dire que papa allait faire beaucoup d'«overtime». Mon père était pipefitter/steamfitter. Pour réaliser certains travaux comme installer une bouilloire géante dans une entreprise, il fallait qu'elle arrête complètement de tourner, qu'elle cesse sa production. Shutdown, mise sur pause, comme le Québec maintenant. Fallait que ça dure le moins longtemps possible. Alors mon père et ses semblables travaillaient presque jour et nuit. Ma mère assumait seule pendant ces jours la charge mentale de la maison. La COVID-19 me rappelle aussi que je suis le fruit d'un arbre marqué par une bactérie. Le bacille de Koch, responsable de la tuberculose. Principale cause de décès en 1867 au Canada. Il a emporté mon grand-père paternel à l'âge tendre de 27 ans. Il a laissé dans un deuil insoutenable ma grand-mère, son petit garçon de 7 ans, devenu plus tard mon père, et son frère. Aussi, Pâques approche. Ma Dulcinée se rappelle avoir rêvé, petite fille, devant la vitrine d'une biscuiterie Oscar où se tenait un géant lapin en chocolat. «Qui aurait dit que je marierais un jour le petit-fils du propriétaire ?» elle s'étonne. En effet, feu mon grand-père maternel a été propriétaire de quelques biscuiteries Oscar à Montréal. Man est tombée dans le marmite des affaires quand elle était petite. Elle et Pa respectent les règles à la lettre, elle m'a assuré. J'écris cette phrase pour signifier qu'ils sont vivants. Et tout le reste pour rappeler qu'ils ont une vie. Aujourd'hui, les 70 ans et plus sont confinés à la maison. C'est super beau de leur jouer de l'accordéon pendant qu'ils écoutent du balcon, sincèrement. Mais, svp, n'oubliez pas que ces «ainés» ont tout un voyage à raconter. Demandez leur comment c'était Pâques dans leur temps ? Comment ils ont rencontré l'âme soeur ? S'ils se rappellent de l'Expo 67 ? Du référendum de 1980 ? De leur vie d'adolescent ? Comme dit la chanson, ils ont mis quelqu'un au monde, on devrait peut-être les écouter !