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Préposées agressées par des bénéficiaires : «une réalité quotidienne»

le samedi 19 mai 2018
Modifié à 6 h 59 min le 19 mai 2018
Par Production Gravite

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(Texte de Marie-Josée Bétournay) Des préposées aux bénéficiaires de la région déplorent les cas d’agressions dont elles sont victimes lorsque vient le temps d’apporter des soins à certains résidents en centres d’hébergement. Les professionnelles confient, sous le couvert de l’anonymat, se heurter à des événements de violences verbales et physiques. Les cas de violence en centres d’hébergement constituent «la réalité quotidienne des préposées aux bénéficiaires», selon Karine Cabana, coordonnatrice du secteur des affaires sociales auprès du Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP). Mme Cabana parle de morsures, de claques derrière la tête, de coups de poing et de tirage de cheveux. «On veut juste les aider», confie une professionnelle en ajoutant se faire frapper au moment de changer la culotte souillée de résidents. Une autre, qui travaille dans une unité réservée aux gens ayant des troubles cognitifs, comme la maladie d’Alzheimer, raconte qu’un patient lui a serré les bras, sans avertissement. Ces cas touchent également des aînés lucides, mentionne une autre préposée. Des résidents utilisent parfois la violence envers le personnel soignant, par manque de patience ou encore en raison de la pénurie de préposées aux bénéficiaires, dit-elle. Mauvaise évaluation et médication Une employée pointe du doigt ce qui constitue une lacune à ses yeux. «C’est triste. Si j’avais eu plus de formation, si j’avais été au courant du diagnostic du patient, j’aurais été plus sur mes gardes», explique-t-elle en précisant adorer son travail et la clientèle. Simon Beaulieu, président du SCFP au Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) de la Montérégie-Ouest, explique que le manque de formation ne constitue qu’un élément. Selon lui, «les patients sont mal évalués avec le temps». Les centres d’hébergement abritent des résidents aux diagnostics psychiatriques, indique-t-il. «Ces patients génèrent des problématiques au personnel. Ce ne sont pas les mêmes approches. Tu ne peux pas appliquer une approche de pacification avec cette clientèle», affirme-t-il. Pour Mme Cabana, les conditions des patients incapables de s’alimenter, de se déplacer ou encore de se laver n’aident en rien la situation en centres d’hébergement. «On doit faire beaucoup d’actions auprès de ces personnes-là. Les contacts sont fréquents et les risques d’agressions augmentent», renchérit-elle. M. Beaulieu fait également référence au changement de la médication des résidents qui peut nécessiter un certain délai avant qu’elle ne leur soit bénéfique. L’instabilité du personnel soignant, résultat d’une pénurie de main-d’œuvre, fait grimper l’anxiété chez les bénéficiaires, soutient Karine Cabana. Selon elle, la variation du personnel soignant autour d’un résident augmente les risques de violence. Formation adaptée à la clientèle Pour pallier la situation, le Syndicat canadien de la fonction publique préconise une formation adaptée à la clientèle en centres d’hébergement. «Comment agir avec un patient agressif, comment je m’installe pour ne pas me blesser», énumère M. Beaulieu. Pour le moment, ajoute-t-il, la formation des préposées aux bénéficiaires repose sur les personnes âgées et le milieu de vie du résident. De son côté, l’employeur, le CISSS de la Montérégie-Ouest, soutient que toutes les préposées aux bénéficiaires en centres d’hébergement reçoivent la même formation, qu’elles soient assignées à une unité prothétique ou non. «La formation Prévention et gestion des symptômes comportementaux et psychologiques de la démence (SCPD) inclut notamment des informations sur les bonnes pratiques pour intervenir auprès de la clientèle avec déficits cognitifs. La formation est donnée une fois par mois à tous les nouveaux employés», mentionne Jade St-Jean, porte-parole du CISSS de la Montérégie-Ouest. Elle invite les professionnels qui ne se sentent pas suffisamment outillés à se tourner vers leur gestionnaire. Nombre de lésions physiques attribuables à la violence en milieu de travail* pour le personnel de la santé 2012-2016, au Québec
  • L’année 2012 : 553
  • L’année 2013 : 655
  • L’année 2014 : 635
  • L’année 2015 : 601
  • L’année 2016 : 791
(Source : Statistiques sur les lésions attribuables à la violence en milieu de travail de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail) * Lésions acceptées avec ou sans IRR (Indemnité de remplacement du revenu)