Actualités

Retrouvaille avec le passé de l’île

le mercredi 05 août 2015
Modifié à 0 h 00 min le 05 août 2015
Par Valérie Gagnon

vgagnon@gravitemedia.com

Après un premier mois de travail, les apprentis archéologues de l’école de fouilles de l’Université de Montréal ont déjà trouvé plusieurs trésors du passé à l’île Saint-Bernard.

Cette école, dirigée par Dr Adrian L. Burke, archéologue au département d’anthropologie de l’Université de Montréal, et Dre Geneviève Treyvaud à l’INRS-ETE (Institut national de la recherche scientifique – Eau Terre Environnement), poursuivra ses recherches sur 3 à 5 ans chaque été. Les étudiants ont gratté et scruté les différentes strates de terre, sept jours par semaine, de 8 h à 22 h. Des étudiants d’origine mohawks de l’Université de Concordia ont aussi participé à cette session de fouille dans le cadre d’un partenariat avec la réserve de Kahnawake, la Ville de Châteauguay et l’île Saint-Bernard.

Tous les artefacts trouvés ont été numérotés, catalogués et ensachés. À la fin de ces recherches, les trouvailles seront mises en valeur et rendues publiques par des expositions au Musée d’archéologie de Roussillon.

«On veut en connaître plus sur l’histoire de l’île Saint-Bernard et de Châteauguay. On pourrait se fier aux documents historiques, mais le problème avec ces documents, c’est souvent l’histoire officielle des gens reconnus comme Charles Le Moyne, Zachary Robutel de La Noue et Marguerite D’Youville, mais cela représente 1 %. Avec l’archéologie, ça nous permet d’en savoir un peu plus sur la vie quotidienne, la vie des gens dont on parle moins, comme les Amérindiens avant et pendant l’arrivée des Français», fait valoir M. Burke

Des traces du 17e siècle

La datation se fait essentiellement par les spécimens trouvés. Si certains échantillons de charbon doivent faire l’objet d’une datation plus précise par carbone 14, ils sont envoyés à un laboratoire spécialisé aux États-Unis. Ce procédé représente des coûts estimés à 600 $ par morceau, ajoute M. Burke.

Pour orienter leurs observations, les archéologues et étudiants ont rassemblé des informations basées sur les documents historiques.

«Les hypothèses tournaient beaucoup autour du Manoir de Zachary Robutel de La Noue qui apparaît sur quelques cartes, mais nous nous disions que peut-être trouverions-nous le bâtiment précédent, celui de Charles Le Moyne. C’était probablement un bâtiment de pierres et de bois. Par exemple, dans ce secteur-là, on trouve possiblement des restes de feu. Il y quelque chose qui a passé au feu avec les fondations en roche, mais aussi des possibles traces de piquets en bois», remarquait Adrian L. Burke lors de la visite du Soleil de Châteauguay.

Le tertre de l’île était probablement un endroit stratégique et un lieu convoité de nos ancêtres du 17e siècle, à cause de son altitude permettant d’avoir une vue imprenable de l’île de Montréal, selon les hypothèses de l’archéologue. «C’est quand même un point haut dans la région. Si vous regardez une carte topographique, c’est un des points les plus hauts; le tertre où est la croix », soutient le spécialiste.

Découvertes étudiantes

Louis-Vincent Laperrière, étudiant de l’Université de Montréal, observait un os qui s’apparentait à celui d’un animal. «Si la tendance se maintien, ça va être dans les ossements que je poursuivrai mes études, soutient-il. Je dirais que c’est un os de cerf», observait-il lors d’une matinée de fouille dans l’île.

Les professeurs ont fait plusieurs sondages dans la terre, une étape qui consiste à évaluer les endroits stratégiques pour qu’une fouille soit riche en indices de temps.

«L’archéologie permet d’apprendre l’histoire non officielle des gens communs, aussi peut-être celle des gens qui étaient ici avec Charles Le Moyne et peut-être ceux qui géraient sa seigneurie. […] C’est probablement un poste de traite ou quelque chose qui permettait à Charles Le Moyne de commercer avec les Amérindiens», soutient Dr Burke.

Quelques objets trouvés

-Une clé

-Pierre à fusil en silex de la France

-Des bouts de pipe française et amérindienne

-Perles de verre d’Europe

-Deux pièces de monnaie française, l’une datant de 1593 et l’autre de 1628 en alliage de cuivre (billon)

-Des ossements de poissons et d’animaux

-Perles en pierre rouge du Minnesota fabriquées par les Amérindiens

-Pipes travaillées en pierre et des pipes en terre cuite blanche pour fumer le tabac

-Chaudrons en cuivre européen découpé pour fabriquer des cônes clinquants qui ont servi de parure pour les vêtements des femmes amérindiennes

-Faïence française à côté de la poterie amérindienne

Éléments identifiés

-Deux campements amérindiens datant d’avant l’arrivée des Français

-Une occupation mixte amérindienne et française reliée à un poste de traite du 17e siècle

-Les restes du premier établissement de Charles Le Moyne datant d’après 1673

-Les fondations du manoir de la seigneurie de Zachary Robutel de La Noue