chronique

Superbactéries : l'arme aux tomates

le vendredi 03 mai 2019
Modifié à 9 h 00 min le 28 mars 2020
Par Michel Thibault

mthibault@gravitemedia.com

Un reportage sur les superbactéries publié ce printemps dans le Journal de Montréal sous la plume d’Héloïse Archambault m’a fait chaud au système immunitaire. Les microbes qui résistent aux antibiotiques représentent une menace grandissante pour l’espèce humaine. Le danger s’incarne dans les infections difficiles voire impossibles à traiter. «Depuis cinq ans, 197 Québécois sont morts après avoir été infectés par une des bactéries résistantes surveillées par le ministère de la Santé (MSSS). Un chiffre qui risque d’augmenter dans le futur, s’entendent pour dire les médecins», fait part le quotidien montréalais. Le problème est planétaire. «La résistance aux antimicrobiens est un phénomène qu’on constate partout dans le monde qui menace notre capacité à traiter les maladies infectieuses et compromet de nombreuses avancées médicales et de santé publique», indique sur son site internet l’Organisation mondiale de la santé. Je sais de quoi est capable un super microbe. Une infection urinaire causée par une E. Coli multirésistante aux antibiotiques m’a affligé en novembre 2016. Une proche a également souffert du même type d’attaque en avril 2017. J’ai retenu de ces expériences un conseil capital de mon médecin. Aux premiers symptômes d’une infection urinaire, il faut faire une analyse et une culture d’urine. L’exercice sert à identifier l’ennemi et, surtout, à révéler quelles armes sont efficaces contre lui. La culture d’urine donne un antibiogramme. Lequel indique à quels antibiotiques le microbe résiste ou est sensible. [caption id="attachment_62202" align="alignleft" width="1024"] L'antibiogramme indique à quels antibiotiques la bactérie causant une infection est résistante (r) ou sensible (s).[/caption] [caption id="attachment_62202" align="alignnone" width="4032"] L'antibiogramme indique à quels antibiotiques la bactérie est résistante (r) ou sensible (s).[/caption] Avant que les résultats de l’antibiogramme soient connus, le médecin m’a prescrit du Ciprofloxacine. Après trois jours du médicament, mon état se détériorait toujours. Je me suis retrouvé aux urgences de l’hôpital avec une fièvre féroce. Comme mon médecin avait pris soin de commander la culture d’urine au départ, les résultats de l’antibiogramme sont arrivés à point. Le processus prend quelques jours. Il a révélé que la bactérie à l’œuvre dans mon système était résistante à 9 antibiotiques sur 16 testés. Dont le «Cipro». Ce médicament a donc été remplacé par l'un des antibiotiques identifiés comme efficace : de l’Ertapenem par voie intraveineuse. Et la bataille fut gagnée. Atteinte à Cuba, une amie a eu moins de chance. Les médecins là-bas essayaient un antibiotique, puis un autre, sans résultat. «Ils jouent à Battleship», elle a déploré. La bactérie a atteint son rein. Les docteurs ont finalement demandé une culture d’urine. Dans son cas, l’Amikacine a fait le travail. À retenir donc, dans la lutte aux microbes, pour diminuer les conséquences fâcheuses comme les décès, il faut identifier l’intrus le plus rapidement possible. Un volet du reportage du Journal de Montréal soulève un espoir. Des chercheurs de l’Université de Sherbrooke sont à mettre au point un nouvel antibiotique tirée de la tomate qui arrive à bout de certains super microbes en bloquant leur système de production d’énergie. Un nouvel angle d’attaque. Le médicament est attendu d’ici 10 ans.