Tribune libre
COVID-19

Une enseignante raconte son quotidien

le samedi 28 mars 2020
Modifié à 11 h 50 min le 23 mars 2020
Par Michel Thibault

mthibault@gravitemedia.com

Enseignante à la Commission scolaire des Grandes-Seigneuries, Janie Mercier Forcier publie des anecdotes sur sa page Facebook en ces temps de la COVID-19. Voulant aider la population à se changer un peu les idées, elle a partagé celui-ci au Soleil de Châteauguay. Jeudi dernier (12 mars), j’étais avec mes élèves en art dramatique. Nous commencions un nouveau projet de création d’un scénario inspiré de l’émission Le cœur a ses raisons. Ma consigne fût la suivante: «EXAGÉREZ toutes vos émotions et vos mimiques». J’étais loin de m’imaginer que le Québec en entier assistait à mon cours. Ce soir-là, les annonces médiatiques déboulèrent et les gens dévalisèrent le Costco. Lundi (16 mars), je suis allée faire l’épicerie. Pour être honnête avec vous, j’ai acheté un paquet de papier de toilette. Que voulez-vous, les tendances ne sont pas toujours jolies, mais plusieurs les suivent. N’étant pas une bonne cuisinière, j’étais impressionnée de voir que les gens savaient exactement quoi mettre dans leur panier mis à part moi (Quand tu cuisines mal, pendant un instant, tu te demandes si le papier de toilette est si utile que ça pour faire cuire tes légumes). Après avoir acheté ce dont j’avais besoin et ce dont je n’avais pas besoin, je me rendis à la pharmacie. Je ne sais pas pourquoi, mais je suis  ressortie avec deux désodorisants. Comme si c’était important de sentir bon, alors qu’on ne peut côtoyer personne. J’ai pris aussi des tampons, même si j’en avais déjà à la maison. Si quelqu’un saigne du nez, vous savez qui contacter. En sortant de la pharmacie, la première chose qui me passa par la tête fût de sortir mon Purell (le fond de bouteille qu’il me restait) EN CACHETTE. Était-ce parce que j’avais honte ou était-ce la peur qu’on ne me le vole? De retour à la maison, après avoir rangé la commande, je regardais mon chien qui avait l’air inquiet. Comme s’il savait qu’il y avait une mince possibilité que je pige dans ses réserves en cas de panique mondiale. Il n’y a pas grand-chose à dire sur mardi. C’était une journée peu productive. J’ai fait un peu de ménage, mais je crois que ce n’est pas le sujet le plus pertinent. Laver son linge sale en public, ce n’est pas pour moi! Le soir venu, j’ai tenté de faire un repas gastronomique (du poulet avec des légumes…). J’avais vraiment l’impression d’être dans Un souper presque parfait. J’aurais fait un super show de tv, surtout le bout où mes mains mouillées ont décidé de lâcher le plat qu’elles tenaient. C’en était terminé pour mes patates… Sous le regard moqueur de mon copain, nous savions que cette gaffe viendrait en paquet de trois. C’est pour ça que 10 minutes plus tard, mon pied décida de s’enfarger dans ma pantoufle. Je n’ai aucune excuse, il n’y avait aucun obstacle. C’est bien ce que je disais au début, une journée peu productive… Nous sommes maintenant mercredi ou bien jeudi, je ne sais plus. Le temps est long même si, sur le coup, plusieurs devaient croire qu’on aurait deux magnifiques semaines de congé. Sans vouloir être pessimiste, aujourd’hui, nous savons une chose, le fait qu’il nous est impossible de savoir quand tout redeviendra à la normale et à quel prix. Comme plusieurs, j’essaie de m’occuper. Je n’arrête pas de dire qu’il ne faut pas trop regarder les réseaux sociaux pour ne pas avoir peur. Cependant, le téléphone à la main, j’ai l’impression d’être toujours dans les premières personnes informées. Des fois, je me demande si nous ne sommes pas au courant des récentes nouvelles avant même que les gens concernés le soient. Écrire ce texte m’a permis d’occuper mon temps. Nous disons souvent que nous manquons de temps dans la vie. Maintenant, la vie nous oblige à prendre ce temps… Janie Mercier Forcier