chronique

Unité de femmes

le vendredi 08 mars 2019
Modifié à 14 h 20 min le 08 mars 2019
Par Michel Thibault

mthibault@gravitemedia.com

Est-ce que Lietteville est proche de la réalité des prisons de femmes au Québec ? Peut-être un peu mais le génie de la télésérie Unité 9 diffusée à Radio-Canada n’est pas là. Apprécier une œuvre d’art en fonction de son degré de ressemblance avec la réalité n’est pas d’un grand intérêt.
« Grâce à leur solidarité, les héroïnes comme Jeanne Biron se libèrent des chaînes de la maltraitance.»
L’attention doit porter sur la «proposition», pour reprendre le terme d’Alex Nevski à La Voix. Et la proposition de l’auteure d’Unité 9 Danielle Trottier est une ode magistrale à l’unité des femmes. Les personnages principaux de la série sont des criminelles qui ont en commun d’avoir été violées et bafouées. Par leurs proches, leur propre famille, qui est la base de la construction de soi. Leur estime est à zéro. Elles continuent l’œuvre de destruction envers elles-mêmes et se retrouvent en prison. Avant même d’être incarcérées, elles sont prisonnières de leur souffrance, des rejets. L’auteure nous a présenté Jeanne Biron et compagnie fermées, chargées de colère et violentes. Les dirigeants de la prison ont d’abord employé la manière forte pour mettre les détenues récalcitrantes au pas. Puis, un moment donné, une femme a occupé temporairement la direction. Sous son impulsion, la culture de l’établissement a changé. Petite à petit, les spectateurs ont été témoins de l’approche féminine misant sur l’empathie et la compréhension de l’autre plutôt que la brutalité. Ça me fait penser à une entrevue avec des policiers qui me faisaient part, l’an dernier, que la parole était maintenant leur outil d’intervention privilégié plutôt que les poings. L’arrivée des femmes dans leurs rangs n’est sans doute pas étrangère à cette évolution. Dans Unité 9, les femmes s’entraident, se soutiennent, s’encouragent. Grâce à leur solidarité, les héroïnes comme Jeanne Biron se libèrent des chaînes de la maltraitance. Dans le dernier épisode, alors que la fin de la télésérie approche, on voit Biron qui, pour la première fois, se sait aimée, croit en elle, au bonheur possible. Elle avoue qu’elle n’aurait jamais cru cela possible en prison. Unité 9 parle de la bienveillance des femmes. Au soin qu’elles prennent des autres. Des traits qu’il est bon de célébrer à l’occasion de la Journée internationale du 8 mars qui est la leur. Car, on le voit dans la vraie vie, le Québec vit une pénurie de main-d’œuvre bienveillante pour prendre soin de ses malades, de ses vieux et de ses enfants. Celles qui sont en poste ne suffisent plus à la tâche. Leur fardeau s’alourdit et pèse jusqu’à l’épuisement. De l’excès de charge, il faut trouver le moyen de les libérer.