Tribune libre
English stories
Est-ce que la langue est un outil ou une arme?
le mardi 16 avril 2019
Modifié à 11 h 41 min le 12 septembre 2019
(English Follows) Le Soleil de Châteauguay a traduit la lettre originalement écrite en anglais
Tandis que le but premier de la politique linguistique au Québec est de favoriser l’intégration dans la communauté francophone plutôt que dans la communauté anglophone, les Québécois eux-mêmes échouent l’objectif.
Comment décrire la situation quand les gens s’en font plus par rapport à votre prononciation des mots en français au lieu de vouloir comprendre votre point de vue? Quand quelqu’un est irrité lors d’une conversation avec vous et met tous vos mots en doute en raison de vos connaissances limitées du français?
Avant d’immigrer, je savais que le Québec est la seule province canadienne où le français est la seule langue officielle reconnue.
En vivant au Québec depuis un certain temps, j’ai appris que cette particularité résulte d’une longue série de batailles linguistiques dont les conséquences sont toujours ressenties aujourd’hui.
Néanmoins, j’ai essayé de mon mieux d’apprendre le français; pour avoir une langue de plus, pour réussir et le plus important pour le respect envers les autres.
Je pense que la politique linguistique du Québec est assez équitable puisqu’elle donne aux francophones le droit de communiquer en français au travail, notamment dans les secteurs économiques où l’anglais a autrefois prévalu. Elle requiert que les immigrants envoient leurs enfants dans une école française pour s’assurer que le français demeure la langue principale au Québec.
Cependant, j’ai remarqué que les immigrants ne sont pas réellement bien accueillis au Québec, plus particulièrement quand ils parlent anglais. Leur accent ou leur lexique restreint en français fait qu’il y a un changement d’attitude envers eux. À plusieurs occasions, les francophones ne prennent pas la peine d’essayer de les comprendre.
« Nous sommes au Québec. Donc, parlez français ». J’entends souvent ces mots dits avec un ton cinglant à ceux qui parlent anglais.
Eh bien, lutter pour préserver sa langue c’est bien, mais discréditer les autres dans ce contexte ce n’est pas correct.
Posture fermée au contact de l’autre, regard déplaisant, de l’ignorance, prétendre qu’on ne les comprend pas sont des situations auxquelles les immigrants sont souvent confrontés.
« Il sonne à la porte ou ils sonnent à la porte? Il sonne ou ils sonnent ». La dame ne cessait de me poser cette question-piège en français, en prétendant qu’elle ne me comprenait pas quand je luis disait que ses enfants n’arrêtaient pas de sonner à ma porte sans raison.
Après lui avoir répété ma phrase à plusieurs reprises, j’ai admis que ma prononciation en français n’était pas parfaite, alors je lui ai suggéré de l’expliquer en anglais.
J’ai été choquée quand la dame a dit fièrement et de manière triomphale qu’elle ne parlait pas anglais et elle a énuméré d’autres langues que je pourrais possiblement parler, mais elle ne les parlait pas. Son regard me fixait, ce qui me faisait sentir comme si parler d’autres langues était tellement honteux
À ce moment, j’ai réalisé que c’était inutile de continuer alors que la conversation est devenue inadéquate. J’ai changé de sujet. Cependant, je me suis sentie coincée dans l’insignifiance.
Était-ce la langue qui était un problème? Pourquoi la femme s’est lancée dans le sujet de la langue?
Quand je demande à d’autres qui sont passés par une similaire expérience, ça peut donner une réponse dans leurs mots, sur ce qu’ils ont ressenti dans leur cœur.
Une amie de Toronto m’a raconté que ça lui est arrivé au Québec.
« Une personne me répétait tout ce que je disais, mais avec le bon accent. Ça m’arrive en Ontario en anglais. J’ai remarqué que ça vient des gens avec une basse estime de soi. Ils essaient de se sentir plus important et suprême en choisissant un seul aspect en se comparant avec quelqu’un qui est plus faible qu’eux dans cet aspect. J’évite ces personnes », m’a-t-elle dit.
Une amie de Montréal m’a dit que ça lui est aussi arrivée.
« Mais vivre dans l’ouest de l’île m’a retiré de plusieurs de ces situations », a-t-elle indiqué.
C’est ce que je dis. J’ai toujours senti un respect mutuel et un certain échange culturel parmi les anglophones.
Mon collègue m’a raconté une histoire relativement à son emploi avec la Ville de Montréal.
« On m’a dit de ne pas parler si je n’étais pas pour parler en français pendant une sortie en ski avec des collègues, même pas dans le bureau. Récemment avec les Canadiens de Montréal, je n’ai pas été considéré pour un emploi parce que je suis allé dans un CÉGEP anglophone », a-t-il mentionné.
En même temps, il pense que nous avons juste à accepter que nous ne nous sentirions jamais réellement bien chez nous.
« Tu affronteras toujours de l’adversité parce que nous sommes des étrangers. Mais tu dois continuer de persister. Il y aura toujours de bonnes personnes qui vont te comprendre et qui vont vouloir t’aider », a-t-il ajouté.
J’aime son attitude positive.
Néanmoins, je me demande comment on doit éduquer les gens pour qu’ils respectent les immigrants tout en ayant une bonne coopération entre les francophones et les anglophones et comment enseigner le multiculturalisme du Canada aux enfants.
Enfin, sommes-nous des humains fait pour s’aider et trouver des solutions ou sommes-nous divisés comme « nous » contre « eux » pour se détruire les uns les autres?
J’avais l’habitude de penser que le français est une belle langue, que le parler était un cadeau spécial dans la vie et qu’être polyglotte est tellement un grand avantage.
Cependant, ces jours-ci je commence à penser que je ne veux plus parler français, que cette langue devient laide quand elle est utilisée contre les autres.
Natalia Fedosieieva