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Chantale, itinérante à Longueuil. (Le crédit photo est Denis Germain.)

ITINÉRANCE

La dure réalité des itinérants

Texte et photos par : Sylvain Daignault - Initiative de journalisme local

Plusieurs tentes installées à l’ombre de l’ancienne église Notre-Dame-de-Grâces, rue Bourassa, permettent de constater que la situation des personnes vivant en situation d’itinérance est plus sérieuse que jamais à Longueuil.

En approchant, entre le vent qui fait claquer les toiles, les véhicules et la cloche d’une école qui annonce la récréation, on distingue le son de gens qui discutent.

«Vous voulez parler à un itinérant, de lancer un homme d’une trentaine d’années en sortant d’une tente. Je suis là. Je peux vous en parler, moi, de l’itinérance!»

Stéphane nous raconte qu’il a choisi l’itinérance. Banni pour quelques temps de la Halte du Coin pour plusieurs jours, il affirme que la mairesse Catherine Fournier connait bien la situation. «Ça prendrait une place avec plus de lits. Il faudrait qu’elle s’occupe plus des humains au lieu de ses chevreuils et de ses parcs.»

Le sans-abri apprécie qu’un regroupement citoyen, Les Bienveillants des rues de Longueuil, passe de temps à autre pour distribuer de la nourriture.

«En approchant, entre le vent qui fait claquer les toiles, les véhicules et la cloche d’une école qui annonce la récréation, on distingue le son de gens qui discutent.»

 

 

Plus loin, un autre homme, également prénommé Stéphane, nous confie qu’il s’agit de son premier hiver dehors. Traînant avec lui ses deux poches de hockey bien pleines, il est d’avis que les services aux itinérants sont très bien à Longueuil. «Mais le problème, affirme-t-il, c’est qu’il y a trop d’itinérants de Montréal, Granby et Sorel qui viennent ici.»

Pour lui, ajouter des lits disponibles n’est pas la solution. «Il faut prendre la personne au début, l’aider à trouver un appartement», croit-il.

Stéphane affirme qu’il pourrait se payer un logement à 650$, mais pas à 1400$ comme c’est le cas présentement dans le secteur.

Plus loin, Pierre, nous ouvre sa tente. À l’intérieur, on aperçoit un homme, une femme et un chien. «Ça prendrait des logements à prix raisonnable pour ceux qui sont sur l’aide sociale», avance-t-il.

Il continue en faisant état de la difficulté de se trouver un emploi. «On peut travailler même sans son secondaire cinq. Mais il faut travailler en-dessous de la table. Et là on va avoir des problèmes. C’est un paquet de troubles.»

Toujours complet

À l’intérieur de l’ancienne église Notre-Dame-de-Grâces, des gens vont et viennent entre les tables et les lits. L’endroit est sombre. Dans un coin, une toile protège comme elle peut un système de chauffage du toit qui coule.

Pierre Rousseau est directeur de la Halte du Coin. À quelques pas de la nef, il indique que les 35 lits disponibles sont devenus insuffisants pour répondre à la demande. «Mardi soir, le soir de la tempête, on a refusé une quinzaine de personnes», précise-t-il.

Pour lui, la crise du logement et l’inflation ont provoqué la tempête parfaite. «Il n’y a pas de solution magique, soupire le directeur qui dit remarquer un changement dans la clientèle. On a des travailleurs saisonniers, des gars de toiture. On voit plus de femmes notamment.»

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L’ancienne église Notre-Dame-de-Grâces sera convertie en logements sociaux cette année.

Tolérance

S’il affirme qu’en général les choses se passent plutôt bien à la Halte, M. Rousseau se veut réaliste.

«Ici, c’est à haut seuil de tolérance. Il y a des gens qui arrivent intoxiqués et on va les prendre comme ça. Mais ils sont responsables de leur comportement et de leurs gestes car il faut assurer la sécurité des intervenants et des autres usagers. Parfois on n’est pas loin d’une poudrière», image M. Rousseau.

Comme dans les autres refuges, la consommation et la vente de drogue sont interdites.

Déménagement

La Halte du Coin doit déménager prochainement car l’ancienne église sera transformée en logements sociaux. Les travaux doivent débuter en mai. Un comité de relocalisation est au travail et des discussions sont en cours mais aucun endroit n’a encore été trouvé.

«Il nous faut un espace entre 6500 et 7500 pieds carrés, souligne M. Rousseau, bien conscient des enjeux de cohabitation qui l’attendent. Ça nous prend un milieu qui va pouvoir être mieux en mesure d’accueillir des gens en situation d’itinérance et situé à moins de 45 minutes de marche du métro de Longueuil.»

Évidemment, il faudra aménager convenablement ce lieu avec des lits, des vestiaires, des douches et des bureaux pour l’administration.  

La Halte du coin compte 27 employés.

Ce qu’on peut souhaiter à la Halte du coin pour 2024? «Avoir de l’air, avoir du financement. Qu’on nous donne les moyens d’aider ces gens-là, de leur redonner leur dignité», de lancer M. Rousseau.

LONGUEUIL
La Halte du Coin, 1599, rue Bourassa - 438 270-1633 – info@lahalteducoin.org
L’Abri de la Rive-Sud, 459, chemin du Coteau-Rouge – 450 646-7809
Hébergement La Casa Bernard-Hubert, 1215, Chemin du Coteau-Rouge – 450 442-4777, Poste 150
Halte-répit au Métro Longueuil, Coin Place CLM et Saint-Charles 0uest, près du P2 – 438 874-3574
 
LA PRAIRIE
Halte répit de l’Avant-Garde, 462 rue Saint-Paul – 450-444-9661 - www.agsmlaprairie.org
L‘Avant-Toît, 636 chemin de Saint-Jean – 450-907-1333 - avant-toit@agsmlaprairie.org
 
SALABERRY-DE-VALLEYFIELD
Halte répit, 24, rue du Marché – 514 839-2403 - nancy@pactederue.com
Refuge d’urgence à haut seuil de tolérance (MHDV), 67 rue Wilfrid, – 450 747-8511 - dg@mhdv.org
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Seneka vit à L’Avant-Toît depuis trois mois. Elle rêve de trouver une place à elle. (Photo: Le Courrier du Sud – Sylvain Daignault)

ITINÉRANCE

L’Avant-Toît à La Prairie : une halte pour mieux repartir

Texte par : Sylvain Daignault - Initiative de journalisme local

Photo par : Le Courrier du Sud - Sylvain Daignault

Le mardi 23 janvier 2024 - Modifié à 8 h 56 min le 23 janvier 2024

Maison d’hébergement pour les personnes vivant une situation d’itinérance, L’Avant-Toît à La Prairie offre un toit et un milieu de vie communautaire afin d’accompagner les personnes traversant une mauvaise période dans leur vie. Situé chemin de Saint-Jean, l’endroit ne dérougit pas depuis son ouverture il y a trois ans. Rencontre avec Michel, Stéphane et Seneka.

C’est dans la cuisine que nous retrouvons le bureau des intervenants. Logique! Au Québec, on passe beaucoup de temps dans la cuisine. Un grand tableau au mur indique les tâches de chacun. Et au menu ce soir, c’est fettucine Alfredo!

Perte d’emploi

Nous retrouvons Michel. Jusqu’à récemment, l’homme de 62 ans habitait un appartenant à Candiac qui lui coûtait 850$ par mois. Mais la perte temporaire de son emploi dans l’industrie du meuble l’a mené à L’Avant-Toît. «Ça faisait quinze ans que j’habitais ce logement», précise-t-il.

Bien qu’il ait retrouvé son emploi à Candiac, Michel ne peut plus occuper son ancien logis dont le loyer a explosé. «Un intervenant ici m’a trouvé un appartement à Brossard. Je vais aller voir si ça me convient et si je peux me rendre à mon travail en autobus», ajoute-t-il.

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Michel, à droite, et Stéphane, de dos, tentent chacun à sa façon de se relever d’un mauvais pas. (Photo: Le Courrier du Sud – Sylvain Daignault)

Divorce

Chauffeur d’excavatrice, Stéphane, de Huntingdon, traverse une mauvaise tempête. Un divorce jumelé à la saisie de son camion et de sa moto ont complètement bouleversé la vie de l’homme de 57 ans. Celui qui a toujours possédé une maison ne cache pas que l’adaptation est difficile. «Dormir à trois dans une chambre, je ne suis pas habitué à ça. Disons que la marche est haute», soupire-t-il.

C’est une personne à l’hôpital qui l’a informé de l’existence de L’Avant-Toît, où il habite depuis trois semaines. «Je ne m’attendais pas pantoute à me retrouver ici, reconnait-il. Mais la malchance, ça arrive à tout le monde.» 

Malgré les épreuves, on sent les deux hommes sereins face aux épreuves qu’ils doivent affronter. «Faut passer à travers et regarder le positif, laisse tomber Stéphane. On a encore la santé, c’est toujours ça.»

Institutionnalisation

À l’écart, au salon, nous rencontrons Seneka. La femme de 32 ans a vécu des abus de toutes sortes. Encore fragile, elle raconte son institutionnalisation parce qu’il n’y avait pas de places disponibles ailleurs. 

«Je ne cadrais dans aucun des services offerts. J’ai donc été institutionalisée durant un an, en attendant qu’on me trouve quelque chose. Pas de téléphone, pas d’Internet, rien. J’ai tellement vu des choses que je n’aurais pas dû voir!» raconte-t-elle, les yeux dans le vide.

C’est un travailleur social qui lui a finalement déniché cette place il y a trois mois.   

Des ennuis de santé empêchent pour l’instant la trentenaire de travailler. Passionnée d’art et de photographie, elle rêve du jour où elle aura un appartement à elle.

Clientèle diversifiée

Intervenant depuis un an et demi, Alexandre Marineau souligne que la clientèle présentement hébergée à L’Avant-Toît est bien paisible. «Mais ce n’est pas toujours comme ça.»

Ainsi, en 2023 poursuit-il, il y a eu plusieurs cas de consommation de speed qui mène à des psychoses. «En dernier recours, quand la personne ne veut pas collaborer, on appelle les policiers», avance-t-il. 

«Pour bien des gens, la consommation est souvent un moyen de défense pour combattre la faim et la peur du rejet», ajoute de son côté l’intervenante Océane Fortin.

Toujours complets

Aux communications pour la Halte répit de l’Avant-Garde depuis trois ans, Laurence Brodeur est catégorique : la situation est grave.

L’organisme ouvert 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, compte 8 places fixes en hébergement et 3 places temporaires. En 2023, 200 personnes y ont trouvé refuge contre 99 en 2022. Une quarantaine de personnes sont sur la liste d’attente.

«Contrairement aux années précédentes, nous sommes toujours complets. On compte de plus en plus de travailleurs et de personnes âgées parmi nos bénéficiaires. On est étonné!»
 
- Laurence Brodeur, responsable des communications pour la Halte répit de l’Avant-Garde

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