Actualités
Choix de la rédaction

Les guêpes : mal-aimées, mais essentielles

le mercredi 22 mai 2024
Modifié à 11 h 02 min le 24 mai 2024
Par Michel Hersir

mhersir@gravitemedia.com

Le rôle crucial de l’abeille comme pollinisatrice, qui permet aux humains de consommer pommes, fraises et autres concombres, est bien connu. Mais qu'en est-il de sa cousine malaimée, la guêpe? Afin de mieux la connaître, on a fait appel à l’entomologiste Olivier Aubry, qui rappelle que la guêpe a elle aussi son rôle en écologie.

Certes, il est difficile d’avoir de la sympathie pour cet insecte qui aime venir à notre rencontre à l’extérieur, surtout lors d’un repas. Mais si elle se plaît à nos côtés, c’est un peu parce qu’elle nous ressemble.

«Les guêpes peuvent faire un peu de pollinisation. Mais elles sont aussi des omnivores, elles vont consommer des fruits, elles peuvent consommer de la viande. […] Elles ont des mandibules pour broyer, casser, découper», explique M. Aubry.

Avec leur fin odorat, elles flairent le parfum de nourriture près de nous et se rapprochent en souhaitant partager le repas.

Tout est relatif

On le sait, l’abeille est essentielle pour la culture de fruits et légumes. Est-ce que la guêpe est tout aussi importante?

«L’importance, tout est relatif, parce que c’est souvent lié aux activités humaines. Mais tout organisme, que ce soient des insectes ou animaux, a son importance en écologie. Même une tique. On peut dire, c’est nuisible, mais il n’y a pas de notion de nuisible en écologie», souligne M. Aubry.

«Si l’espèce s’est maintenue jusqu’à présent en termes d’évolution, c’est qu’elle a un rôle à jouer dans le réseau trophique de l’écologie. Les guêpes vont avoir d’autres rôles», ajoute le chargé de cours à l’UQAM.

Parmi ceux-ci : son rôle de prédateur permet le contrôle des insectes ravageurs.

M. Aubry donne également l’exemple bien connu du déclin de populations d’oiseaux de proie dans les années 70, lié au DDT, un insecticide. «C’était parce que les oiseaux mangeaient des proies, qui eux mangeaient des insectes qui avaient été contaminés au DDT», explique-t-il.

«C’est dans ce sens-là où les guêpes peuvent avoir un impact plus largement sur d’autres espèces de mammifères, mais c’est plus difficile à quantifier, et surtout, on ne voit pas l’impact, le bénéfice économique, comme pour les pollinisateurs», affirme le chargé de cours.

Moins d’insectes

Le déclin des populations d’abeilles est largement documenté. Les populations de guêpes, elles? Pas aussi évident à documenter.

«Les abeilles, c’est facile avec les apiculteurs de faire un suivi. Chez les guêpes, c’est plus difficile de le savoir en détails précis. On va plus le voir dans le sens où, en général, les insectes, on en voit de moins en moins. Il y a des études qui ont été faites là-dessus», informe M. Aubry.

Selon l’Insectarium de Montréal, l’impression qu’elles sont plus nombreuses année après année relève plutôt du fait qu’au fur et à mesure que l’été progresse, le nombre d’adultes dans la colonie augmente, de plus en plus rapidement, atteignant son apogée à la fin de l’été.

«Ce cycle de vie a pour effet, chaque année, de donner l’impression que ces insectes deviennent subitement nombreux et qu’il y en a beaucoup», explique-t-il sur son site.

Il n’y a de plus pas de recette miracle pour qu’une guêpe arrête de tourner autour de soi.

«Idéalement c’est de ne pas bouger et surtout pas de ne pas faire de gestes brusques, parce que c’est là où l’on risque de les énerver et elles vont se mettre à piquer. Normalement, si on ne bouge pas, on reste calme, elle va finir par repartir. Ou alors c’est essayé de la repousser gentiment avec la main», suggère Olivier Aubry.

 

À LIRE ÉGALEMENT : Aider les abeilles autrement: des fleurs nectarifères plutôt que les pissenlits

 

Polliniser au pinceau, pas aussi efficace

La pollinisation est le processus par lequel le pollen est transféré d’une fleur à une autre, permettant la fécondation et la production de fruits et légumes. Un processus qui dépend d’insectes pollinisateur comme l’abeille ou le bourdon.

«Si ces pollinisateurs n’étaient pas là, ben là, on aurait le prix de fruits et légumes qui augmenterait d’un facteur énorme», souligne l’entomologiste Olivier Aubry, qui, dans ses expériences de doctorat, a pollinisé des fleurs de pommiers, dans des cages où les insectes ne pouvaient entrer.

«C’est très long!, assure-t-il. De là l’importance des abeilles et autres pollinisateurs.»