chronique

Ma première job

le vendredi 19 avril 2019
Modifié à 15 h 34 min le 19 avril 2019
Par Michel Thibault

mthibault@gravitemedia.com

Raymond travaillait comme commis dans une épicerie. Suzanne servait des clients chez McDo. Denis bossait chez un fabricant de bière d’épinette. Presque tous mes amis avaient un emploi d’été. Pas moi. À 16 ou 17 ans, je cherchais désespérément du travail, une première job. «Si personne ne me donne une première chance, je n’aurai jamais d’expérience ! Je ne travaillerai jamais», je pestais. Vous savez comment les ados dramatisent. Pour faire ses tout premiers pas sur le marché de l’emploi, autour de 1978, il fallait pouvoir compter sur des contacts. Et c’est grâce à un ami que le miracle s’est produit. De vive voix comme c’était la façon de communiquer dans le temps, mon cher Stéphane m’a annoncé : «J’ai été engagé comme commis où mon père travaille. Voudrais-tu prendre ma place de laveur de vaisselle au restaurant ? Je peux parler de toi au patron, il est très gentil». Si on n’avait pas été dehors, j’aurais sauté au plafond. Je flottais sur un cumulus de beau temps. «Bien sûr !» Avec le «pushing» de Stéphane, je suis devenu officiellement plongeur au chic restaurant Le Navire dans le Vieux-Montréal. Pour m’y rendre à partir de la maison familiale à Laval, je devais prendre l’autobus et le métro. La nervosité a eu le temps de s’installer confortablement durant le trajet. Le restaurant, qui n’existe plus aujourd’hui, logeait dans une bâtisse ancestrale de l’étroite rue Saint-Vincent. Je suis arrivé vers 8h. Il régnait un silence de bibliothèque à l’intérieur. J’ai remarqué des chaises et des tables en bois dans la salle à manger. Une fenêtre jetait un faisceau de lumière sur le tapis du bar plongé dans la pénombre. Si ma mémoire est fidèle, c’est lui qui a bénéficié de ma première tâche rémunérée de salarié. Une tâche dans laquelle j’avais des antécédents par contre : passer la balayeuse. Ça a bien été. Laver les toilettes, me savonner les mains, couper des légumes, éplucher des patates selon les instructions du chef aussi. La sauce s’est gâtée à l’heure du midi. Les serveurs se relayaient dans la cuisine avec des plateaux chargés de gratte-ciel d’assiettes sales de toutes les dimensions, de verres, et de tonnes d’ustensiles. Il y en avait partout autour de moi. «Je n’y arriverai pas», j’ai pensé. J’étais découragé. Sensible à mon sort de recrue dépassée par la tâche à accomplir, une serveuse m’a rassuré et donné un coup de main. Au fil des jours, j’ai amélioré ma technique et j’ai atteint le degré d’efficacité requis pour garder mon poste. Ma carrière d’honnête travailleur était lancée. Est-ce plus facile de faire ses premiers pas sur le marché du travail aujourd'hui ? Internet et les réseaux sociaux constituent sans doute une amélioration pour dénicher un premier poste, dont ce site http://placement.emploiquebec.gouv.qc.ca/mbe/login/portail/portcherc.asp