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COVID-19

Main-d’œuvre agricole : un début de saison dans l’incertitude

le dimanche 31 mai 2020
Modifié à 11 h 08 min le 29 mai 2020
Par Vicky Girard

vgirard@gravitemedia.com

Que ce soit la baisse de la demande causée par la fermeture des restaurants et hôtels ou la capacité de transformation diminuée en raison de mesures sanitaires actuelles, la pandémie apporte son lot de défis dans tous les secteurs agricoles. Toutefois, présentement, la crainte de manquer de main-d’œuvre dans les champs est l’inquiétude principale.   La fermeture des frontières, notamment du Guatemala et du Mexique d’où proviennent la majorité des embauches estivales dans les fermes, représente la plus grosse pièce du casse-tête agricole. Les ministres de l’Agriculture fédéraux et provinciaux, Marie-André Bibeau, et André Lamontagne, disent collaborer de façon assidue pour aider les agriculteurs.
«On construit un avion en plein vol.» -Marie-André Bibeau, ministre fédérale de l'Agriculture
«On a réussi à permettre l’arrivée de travailleurs guatémaltèques la semaine dernière, laisse savoir Mme Bibeau, sans pouvoir la chiffrer. On redouble d’efforts pour surmonter ce défi, mais chaque semaine, il y a des obstacles avec lesquels on doit composer.» M. Lamontagne affirme qu’il est présentement ardu de dresser un bilan du nombre de travailleurs étrangers arrivés au Québec, puisque, par exemple, 15% de ceux qui étaient attendus en avril ne se sont pas présentés ou que des groupes arrivent après la date prévue. L’appel de recrutement local du gouvernement québécois a tout de même porté fruit, estime M. Lamontagne. «Environ 10 000 candidatures ont été reçues. En date du 18 mai environ, il y avait 300 jumelages. Avec le temps et le taux de travailleurs qui vont arriver au Canada, les agriculteurs vont évaluer leur besoin et recruter», détaille-t-il. L’Union des producteurs agricoles (UPA) est quant à elle en mesure d’affirmer qu’elle n’attend pas plus de 50% des 5 000 travailleurs étrangers normalement présents en Montérégie. Elle a une banque de 2 500 travailleurs québécois dans la région, mais ignore si ce sera suffisant. «Cela va dépendre de la disponibilité de cette main-d’œuvre pour les récoltes entre juin et octobre», laisse-t-elle savoir. Des fermes aux marchés Les marchés sont partagés sur les craintes qu’ont les producteurs qui les fournissent. L’acheteur des fruits et légumes au Cultivateur à Saint-Constant est d’avis que les agriculteurs ont été affectés par la température froide et le manque de soleil beaucoup plus que par la COVID-19 jusqu’à maintenant. Celui qui compte 12 ans d’expérience en tant qu’agriculteur considère néanmoins qu’il s’agit d’un domaine où l’adaptation aux situations changeantes a toujours été de mise. «On vit au jour le jour, tout est tellement incertain en ce moment», dit celui qui ne veut pas se nommer. Il constate qu’il y a des craintes, mais que ce n’est pas «outre-mesure» selon les producteurs auprès desquels il s’approvisionne. Il affirme que les prix et l’approvisionnement ne sont pas affectés par la crise au marché présentement. Jonathan Tardif, propriétaire du Fruits et Légumes Taschereau à La Prairie, considère également que la température a nui davantage aux agriculteurs ce printemps. «Le départ de la saison est très lent», dit-il. La ministre fédérale de l’Agriculture croit d’ailleurs que cet élément pourrait permettre de donner plus de temps aux producteurs pour embaucher. Du côté du Marché des Jardiniers à La Prairie, il y a définitivement une crainte des producteurs en ce qui a trait à la main-d’œuvre. «Une partie des travailleurs étrangers ne seront pas présents cette année. Des travailleurs québécois sont présentement disponibles, mais risquent de ne plus l’être si l’économie redémarre complètement», affirme Annie Bourbonnais, responsable des communications pour le Marché. Elle ajoute que personne n’est à l’abri d’une éclosion de COVID-19 sur les fermes, ce qui limiterait, voire empêcherait toute récolte. Quelques mesures financières du gouvernement fédéral -Investissement de 3 G$ par province. Ce montant a été utilisé au Québec via les incitatifs aux travailleurs québécois dans les champs; -50 M$ libérés pour que les employeurs (producteurs et transformateurs) puissent recevoir 1 500$ par travailleur étranger, afin d’absorber les coûts liés à la période d’isolement obligatoire de 14 jours; -Quatre programmes fédéraux de gestion de risques existent déjà, offrant 1,6 G$ par année aux agriculteurs.