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Pas de manquement en déontologie pour l’ex-maire Routhier, tranche le juge

le vendredi 04 février 2022
Modifié à
Par Valérie Lessard

vlessard@gravitemedia.com

L'ancien maire de Châteauguay Pierre-Paul Routhier. (Photo : Archives)

La Commission municipale du Québec conclut dans un jugement rendu le 21 janvier que l’ancien maire de Châteauguay Pierre-Paul Routhier n’a pas commis de manquement au code de déontologie de la Ville. On lui reprochait d’avoir révélé publiquement des informations au sujet de l’état de santé du conseiller François Le Borgne, alors que ce dernier avait demandé à ce que celles-ci restent confidentielles.

Le litige s’était produit à l’occasion d’une séance d’information publique virtuelle, le 13 avril, à propos de la réglementation du parc Joseph-Allard, qui faisait l’objet de plaintes du voisinage en raison de sa fréquentation.

Une référence au coeur

 Au cours de la rencontre, M. Le Borgne, conseiller de ce quartier, «effectue alors une intervention bien sentie exprimant son voeu que la situation se règle rapidement afin qu’il ne soit pas encore pris pour intervenir à de nombreuses reprises auprès des personnes occupant les lieux de façon irrespectueuse à l’égard de la vocation des espaces verts et des voisins dans le secteur aux abords du fleuve ou du lac Saint-Louis», relate le juge. Ce à quoi M. Routhier répond: «Merci, merci beaucoup monsieur Le Borgne, mais faites attention à votre p’tit coeur là, hein?»

Cette déclaration est à la base du manquement reproché à M.Routhier, écrit le juge Roy. Ce dernier devait déterminer si l’ancien maire avait communiqué un renseignement obtenu dans l’exercice de ses fonctions qui se voulait confidentiel, «et ce favorisant ses intérêts et allant à l’encontre de ceux d’autres personnes», contrevenant au Code de déontologie de la municipalité.

On apprend dans le jugement que le conseiller Le Borgne avait informé le maire quelques mois plus tôt qu’il avait fait un infarctus à l’été 2020.

L’analyse du juge, qui précise avoir regardé l’entièreté de la soirée d’information virtuelle, conclut que la preuve ne permet pas d’établir que l’utilisation de l’expression «’’faites attention à votre petit cœur’’ a été employée de façon délibérée pour faire référence à l’infarctus subi par M. Le Borgne».

«Le Tribunal conclut sans l’ombre d’un doute que la réaction du maire Routhier suggérait plutôt une réaction aux propos énergiques et enflammés du conseiller Le Borgne portant sur un point particulier de la consultation publique et non d’un aspect de la condition médicale de ce dernier», écrit  M. Roy. Il ajoute que le commentaire du maire «est peut-être maladroit, mais ce n’est pas le rôle du Tribunal de sanctionner les élus municipaux pour un manquement qui ne figure pas au Code d’éthique ni dans la citation en déontologie.»

«Pas de la belle politique»

Invité à commenter la décision de la Commission, M. Le Borgne s’est dit troublé que le juge ne mentionne pas dans sa décision que M. Routhier ait fait référence à deux reprises à son cœur dans le cadre de l’échange. Dans la vidéo disponible sur le web, après que M. Routhier ait suggéré à son collègue de faire attention «à son petit cœur», on peut entendre un citoyen qui demande des explications sur cette référence soulignant qu’il s’agissait d’un commentaire «baveux». M. Le Borgne répond: «C’est une très bonne question (à savoir) pourquoi il est allé dire ça». M. Routhier intervient à nouveau en soulignant qu’on n’avait pas répondu à la question du citoyen sur le «cœur».

Vidéo de la présentation : Soirée d'information publique (parc Joseph-Allard) (minute 58:00)

«Ça me trouble que ça n’est pas été pris en considération parce que ça faisait partie de l’affaire. C’est justement parce que ça a été mentionné une deuxième fois que j’ai décidé de faire une dénonciation», explique M. Le Borgne.

Il jugeait que de tels propos n’avaient pas leur place dans l’espace politique. «Ce n’était pas de bonne guerre, c’était de mauvaise guerre. C’est mesquin de faire référence à ça», commente-t-il.

C’est à la suite d’une enquête administrative de la Direction du contentieux et des enquêtes de la Commission que cette dernière a décidé de porter le dossier devant un juge.

De son côté, Pierre-Paul Routhier se demande pourquoi la Commission a décidé de se pencher sur cette histoire, qui selon lui, auront coûté près de 20 000 $ en frais légaux à la municipalité. «Nous n’avions pas présenté de défense parce qu’on jugeait la dénonciation farfelue et frivole», commente-t-il.  

Questionné à savoir s’il regrette les propos qu’il a tenus lors de cette soirée d’information, M. Routhier a répondu qu’il trouvait dommage les conséquences qui ont suivi, mais assure qu’il n’était pas mal intentionné. «Je faisais référence à son emportement, je vous aurais dit la même chose. Il n’y avait aucune incidence à son état de santé», souligne-t-il.