Poignardé en 2020, Martin Legros continue d’avancer

«Ça m’a couté cher physiquement, mais je ne regrette pas mon geste parce que cette fille-là [la barmaid] se serait peut-être fait tuer», affirme Martin Legros. (Photo:Le Soleil de Châteauguay -Emilie Palumbi)
En février 2020, Martin Legros s’est fait poignarder au bar La Chope à Châteauguay alors qu’il prenait la défense d’une barmaid. Trois ans, un coma et plusieurs opérations plus tard, M. Legros est assis à une table tranquille dans le bar où sa vie a changé en une nuit afin de raconter son histoire.
«D’habitude, c’était tout le temps les mêmes clients qui venaient les vendredis», se remémore-t-il.
Ce soir-là, trois individus de Montréal intoxiqués sont entrés dans le bar. Ils ont sorti leur propre alcool. La barmaid Mélanie Fyfe est venue les avertir qu’ils devaient consommer des boissons vendues sur place et les a mis à la porte. Le ton a monté quand elle a suivi les Montréalais dehors.
Fort de 10 ans d’expérience en tant que portier dans un bar, M. Legros s’est interposé. «Même aujourd’hui, je verrais ça, et je suis sûr que je m’en mêlerais. C’est plus fort que moi», affirme-t-il.
L’agresseur a sorti une lame de 30 cm et l’a poignardé dans le ventre. L’homme avait sept couteaux sur lui.
«Ce soir-là, si on avait été dix à se lever, peut-être que je ne me serais pas fait poignarder», confie la victime, la seule personne à avoir pris la défense de la barmaid.
Toutefois, des gens l’ont secouru ensuite. Le responsable du karaoké, Mike Smith, a mis de la pression sur sa blessure pour éviter qu’il perde trop de sang, le temps que les secours arrivent. Ce geste lui a sauvé la vie parce que sa veine cave avait été touchée. Elle sert à faire circuler le sang de la tête, du cou, des bras et du thorax jusqu'au cœur et aurait normalement dû se vider en moins d’une minute.
Joint par Le Soleil de Châteauguay, M. Smith ne s’en glorifie pas. Il est seulement heureux que M. Legros soit encore en vie. Il insiste pour rappeler l’importance des cours de premiers soins.
Se réveiller en pandémie
Lorsque Martin Legros a été plongé dans le coma, c’était avant la pandémie. Il a repris connaissance à la mi-avril, incapable de voir sa famille en raison du confinement. «Quand tu te réveilles d’une épreuve comme ça, tu as besoin de tes proches. J’ai vécu l’enfer», explique celui qui n’a pas pu voir les siens avant quatre mois.
Il a failli mourir deux fois: le soir même de l’agression et le 12 mars, alors que ses organes internes étaient enflés. Une quinzaine de médecins lui ont mentionné qu’il aurait dû être mort. «Ils m’ont dit que si je suis encore en vie c’est grâce à ma force de caractère et ma force physique», mentionne-t-il.
M. Legros ne voulait pas accepter la possibilité qu’il ne pourrait plus marcher. «En cachette, je prenais ma marchette et je faisais des longueurs dans ma chambre pour renforcer mes jambes», confie-t-il.
Une sentence «bonbon»
Son agresseur, Benoit Bergeron, a écopé de quatre ans de prison, réduite par la suite à un peu plus de deux ans et demi en raison de la détention provisoire. Une sentence «bonbon», estime M. Legros.
«Il [l’agresseur] m’a écrit une lettre d’excuse, il a écrit: «Désolé d’avoir gâché ta soirée». Quoi?! Ma soirée? C’est ma vie, la vie de mes proches, ce n’est pas une soirée que tu as gâchée! Il n’est pas conscient de ce qu’il a fait.»
-Martin Legros
Malgré tout, il préfère tourner la page et consacrer ses énergies à guérir. Il ne croit pas pouvoir travailler à nouveau. Il tente donc de trouver des manières d’occuper son temps au lieu de s’apitoyer sur son sort.
Agressions armées à Châteauguay
2019 : 49
2020 : 53
2021 : 56
2022 : 64
2023 : 21
(Source : Service de police de Châteauguay)