Société

Le défi d’être ado… et maman

le samedi 28 juillet 2018
Modifié à 21 h 18 min le 28 juillet 2018
Par Patricia Blackburn

pblackburn@gravitemedia.com

Perte d’amis, préjugés, conciliation famille-études, les défis sont nombreux pour les adolescentes qui décident de poursuivre une grossesse. Dans le local du Centre Options, qui offre des services aux jeunes mamans, Jessica Labonté et Laurence Caza discutent entre elles. Elles ont toutes deux 18 ans. Jessica est assise en tenant dans ses bras son fils Noah, âgé d’à peine trois semaines. Dans un espace rempli de jouets, son petit Mason, deux ans, s’amuse. Il est né lorsqu’elle avait 16 ans. «J’étais alors en secondaire quatre à l’école H.S. Billings. Quand mon ventre s’est fait plus visible, j’ai dû poursuivre mes études à la maison car je subissais de l’intimidation de la part d’autres élèves», raconte-t-elle. Un élève l’aurait même, une fois, poussée dans les casiers. Elle a finalement pu terminer ses études secondaires, en partie avec un tuteur à la maison, l’autre partie dans une classe spéciale mise en place par l’école afin d’isoler les élèves qui vivent différentes problématiques. «On m’a dit que je n’étais pas la première jeune maman à fréquenter cette classe. Mais que j’étais l’une des rares à y être restée jusqu’au bout» confie-t-elle avec fierté.
«Je sentais beaucoup de pression pour aller vers l’avortement. Mais je n’étais pas à l’aise avec ça» -Laurence.
Sur un autre sofa, Laurence écoute Jessica raconter son histoire avec attention. À 18 ans, elle attend son premier enfant dans les prochaines semaines. «Ce n’est pas une décision facile à prendre. Si je n’avais pas le soutien de ma famille, je ne sais pas si j’aurais fait le même choix, confie celle qui devra élever l’enfant sans l’aide du père. Elle a choisi de mettre un terme aux études qu’elle suivait au cégep pour se préparer à l’arrivée de son bébé. «Je ne sais pas encore comment je vais m’y prendre sur le plan financier, ça m’angoisse beaucoup, mais je pense retourner aux études un peu plus tard, dit la jeune femme, qui a quitté Longueuil pour venir s’établir avec ses parents à Châteauguay. Même si elle a dû faire une croix sur «sa vie de jeune qui fait tout le temps la fête», Laurence dit être heureuse d’avoir pris cette décision. «Ça m’a transformée. Je suis devenue plus mature». [caption id="attachment_46960" align="alignright" width="516"] Jessica avec son fils aîné, Mason. (Crédit photo: Patricia Blackburn)[/caption] Faire face aux jugements Depuis les années 1990, les adolescentes (14-19 ans) qui tombent enceintes choisissent en plus grand nombre l’avortement que la poursuite de leur grossesse, selon l’Institut de la statistique du Québec. Pendant l’entrevue qu’elles ont accordée au Journal, les deux jeunes femmes s’entendaient d’ailleurs pour dire que le jugement des autres envers leur choix pesait lourd. Et ce, malgré le fait que leur décision soit pleinement assumée. «Je n’ai pas suivi les cours prénataux offerts au CLSC à cause de ça, avoue Laurence. J’étais entourée de femmes de trente ans, en couple, avec une carrière, une maison. Je ne me sentais pas à ma place.» Jessica acquiesce d’un signe de tête. «On sent beaucoup de préjugés dans le regard des autres. On se fait souvent dire : tu vas gâcher ta vie. On perd beaucoup d’amis, aussi, qui ne comprennent pas notre choix ou qui continuent simplement à vivre leur vie d’adolescent, alors que pour nous, la trajectoire a dévié».
«Avoir des enfants change beaucoup la vie, même si je suis contente d’avoir mes fils et que je ne peux pas imaginer ma vie sans eux»- Jessica.
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