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Difficile de trouver un premier emploi quand on est Asperger

le mercredi 13 avril 2016
Modifié à 0 h 00 min le 13 avril 2016
Par Valérie Lessard

vlessard@gravitemedia.com

Du haut de ses 17 ans, le Châteauguois Dominic Bélisle souhaitait se trouver un premier emploi en attendant de poursuivre ses études postsecondaires. Le hic, c’est qu’il a une forme d’autisme, le syndrome d’Asperger, qui occasionne des troubles sociaux et qui lui nuit dans sa recherche d’emploi.

Sur son CV, Dominic Bélisle a tout d’un adolescent classique. Il n’a jamais eu d’emploi auparavant; a terminé ses études secondaires à l’école Billings avec des mentions honorifiques et a l’avantage d’être bilingue. Il s’est inscrit dans un cours de comptabilité au centre Nova qui commencera en septembre. En attendant, il souhaitait travailler, pour s’occuper, et bien entendu pour amasser de l’argent. Mais la recherche d’emploi s’est avérée très ardue.

Problème de première impression

En raison de son syndrome d’Asperger, Dominic Bélisle a des lacunes de communication et de sociabilité. Cela lui nuit lorsque vient le temps de déposer un CV chez un employeur potentiel, puisque généralement la première impression est très importante. «Je ne suis pas éloquent, concède le Châteauguois. Mais ce n’est pas parce que je ne suis pas bon en entrevue que je ne suis pas capable de travailler.» Depuis le mois de décembre, il a envoyé une quinzaine de CV à des endroits où il était clairement indiqué qu’ils recherchaient des employés, mais le jeune homme n’avait jamais eu de retour d’appel. Au départ, il ne mentionnait pas qu’il est Asperger. Sa mère, Jasmine Zitouni, l’accompagnait lorsqu’il se présentait dans des commerces pour y déposer son CV pour lui donner confiance. Un employeur a clairement indiqué qu’il n’engagerait jamais un jeune vu avec sa mère. Découragée, Mme Zitouni a cessé de l’accompagner, mais cela n’a pas eu plus d’impact positif dans sa recherche d’emploi. «Je sais que je ne serais pas bon comme caissier par exemple, mais je pourrais faire d’autres tâches comme du classement. Apparemment, parce que je n’ai pas de charisme je ne serais pas un bon travailleur», déplore Dominique Bélisle.

Une chance chez McDonald’s

Après plusieurs mois d’attente et de démarches pour trouver un emploi, l’adolescent a finalement eu une bonne nouvelle de la part du restaurant McDonald’s à Châteauguay. Le propriétaire du restaurant, Tom Capelli, a accepté de lui donner une chance. M. Capelli a déjà un employé autiste et a déjà embauché dans le passé des gens avec un handicap physique ou une limitation intellectuelle. Il faut préciser que le propriétaire du McDonald’s est aussi sensible à cette cause puisqu’il est lui-même papa d’un garçon atteint de dystrophie musculaire. L’homme d’affaires est toutefois très honnête : ce n’est pas facile d’embaucher ce type d’employés. «C’est difficile pour le jeune en question, pour l’équipe de gérants et pour les autres employés, parce que tout le monde doit s’adapter. C’est sûr que ça prend beaucoup d’énergie», convient-il. Malgré tout, cela ne le freine pas. «C’est ma façon de participer à la communauté», confie M. Capelli. Selon lui, pour optimiser les chances de succès de l’embauche d’une personne ayant un trouble spécifique, la collaboration des parents est primordiale.  «C’est sûr qu’on a besoin d’un soutien de leur part, dit-il. Je m’assois avec les parents pour qu’ils m’expliquent c’est quoi les limitations du jeune. Est-ce qu’il y a des moyens d’intervenir ou de faciliter son travail pour qu’il se sente bien?»

Ce genre de personnel a aussi des avantages pour une compagnie selon Tom Capelli. Quand ça fonctionne bien, ce sont des employés fiables, motivés qui, de façon générale, demeurent plusieurs années pour la compagnie.

Beaucoup de préjugés à briser

La question du travail chez les personnes autistes est un combat de tous les jours pour la Fédération québécoise de l’autisme. Dans le cadre du Mois de l’autisme, qui est présentement en cours en avril, l’organisme a mis sur pied une campagne de sensibilisation destinée aux employeurs dont le slogan est «Différent. Mais tout aussi compétent». Selon la coordonnatrice de projets à la Fédération, Annick Lavogiez, il est très difficile pour une personne autiste d’obtenir un emploi à la hauteur de ses compétences. «Malheureusement, beaucoup ne sont pas embauchés ou elles le sont mais elles sont mal payées ou elles n’obtiennent pas les postes pour lesquelles elles pourraient être qualifiées.» Doit-on informer l’employeur qu’on est autiste? Selon Mme Lavogiez, c’est une question délicate. «On ne recommande pas de le dire ou de ne pas le dire, c’est un choix très personnel. Par contre c’est important de préciser que les gens ont le droit de ne pas le dire», explique-t-elle.

De façon générale, on retrouve chez les personnes autistes des caractéristiques qui peuvent plaire à un employeur. «Ce sont des gens très fiables, honnêtes, assidus et ponctuels», souligne Mme Lavogiez.

Qu’est-ce que le syndrome d’Asperger?

Le syndrome d’Asperger est un trouble de la famille de l’autisme. Les personnes Asperger ont des difficultés à sociabiliser et à interagir avec d’autres personnes. Ce sont des gens intelligents, perfectionnistes et exigeants. (Source :Passeport santé)