Culture

Être ado, devant les caméras

le vendredi 16 février 2024
Modifié à 15 h 24 min le 16 février 2024
Par Ali Dostie

adostie@gravitemedia.com

Mika, Loïc et Émy (Photos : Gracieuseté - Télé-Québec)

Dix jeunes ont accepté de vivre les hauts et les bas de leur adolescence devant les caméras. En visionnant la série documentaire Être ado qui les suit de secondaire 1 à 5, les protagonistes revoient en quelque sorte le film de leur vie – de leur adolescence du moins. Rencontre avec Loïc (Châteauguay), Émy (Longueuil) et Mika (Chambly), en compagnie de la réalisatrice Marisol Aubé. 

Pourquoi avez-vous voulu participer à Être ado ?

Émy : «Je trouvais juste que c’était une opportunité, que c’était spécial. J’avais 11 ans, je me disais «Je vais passer à la TV!».»

Loïc : «Mon coach de hockey me l’a présenté. Ç’a avait l’air d’un beau projet, je leur ai fait confiance. C’est une expérience de vie.»

Mika : «Quand t’es plus jeune, passer à la TV, ç’a l’air gros. Tu penses pas au côté privé, ça avait l’air grand!»

Comment se déroulaient les journées de tournage ?

Mika : Ma mère, [la réalisatrice], me le disait d’avance… Ç’a toujours été agréable et j’ai pu rencontrer plein de monde, dont Marc Lamy, un caméraman incroyable. C’est un peu pour ça aujourd’hui que je suis en ATM [Art et technologie des médias, à Jonquière]. »

Marisol Aubé : «On restait en contact avec eux… Loïc, s’il avait un gros tournoi de hockey, je demandais : es-tu à l’aise qu’on y aille? On ne débarquait jamais à l’improviste. On décidait ensemble.»

Loïc, est-ce qu’il a été difficile de vivre la défaite de la finale de la Coupe Dodge [avec les Grenadiers] devant les caméras ?

Loïc : «C’était un moment triste sur le coup, mais je ne regrette rien. Au contraire, ça amène de quoi à l’émission, parce que c’était une grosse partie de ma vie.»

Dans l’émission, on vous incite à raconter ce que vous vivez, à parler de vos émotions. Était-ce facile de se confier ?

Loic : «Marisol nous posait des questions, mais toujours dans le respect, et si on n’était pas à l’aise, on ne répondait pas. »

Marisol Aubé : «On a développé quelque chose. Avec Émy, je le sentais, qu’elle me confiait des trucs qu’elle disait ni à ses amis ni à sa famille.»

Émy (Photo : Gracieuseté - Télé-Québec)

Émy : «Je sentais qu’elle me comprenait et n’allait pas juger mes émotions, donc je me laissais vraiment aller. Au fil des années, on a développé un lien et ça aide à s’ouvrir devant les caméras.»

Marisol Aubé : «C’est un rôle qui n’existe pas vraiment dans la vie. Je ne suis pas une psy, pas une prof, pas un parent, pas quelqu’un qui va donner des conseils. On allait là pour jaser et je voulais que personne ne regrette ce qu’il confie. Il fallait que ça les aide… Une introspection provoquée, mais pas du sensationnalisme.»

Qu’avez-vous pensé de l’émission lors de son visionnement ?

Mika : «J’ai vraiment de la misère à regarder. Je vois la partie en arrière des choses aussi. Il y a l’image qu’on voit, et moi je sais ce que j’ai vécu pendant ce temps… Des fois, c’est un peu plus difficile, des fois, c’est nice.

Mika  (Photo : Gracieuseté - Télé-Québec)

Personnellement, j’aime mieux l’écouter avec ma blonde, mes amis, parce que seul, je me mets à capoter un peu. Mais quand je le regarde du point de vue réalisation, manière de filmer, c’est un méchant beau projet.»

Loic : «À date, je suis à l’aise avec ce qui sort. C’est un super beau projet, super bien monté.»

Y a-t-il des éléments qui vous ont étonné dans l’émission ?

Émy: «Des bouts, je ne me souvenais pas que les caméras étaient là. Je redécouvrais ce qui se passait, mon secondaire 1. C’était vraiment spécial.»

Mika : «L’avantage d’avoir ma mère comme réalisatrice [le ton semble un brin ironique!], c’est que tu peux être en train de faire quelque chose, tranquille, et soudainement, tu as une caméra dans ta face! C’était assez fréquent!»
Marisol Aubé : «Durant la pandémie, je demandais aux familles de tourner avec leur cellulaire. De mars à juin 2020, on n’a pas pu filmer. Et moi, je m’en donnais à cœur joie! Mica n’a jamais voulu voir quoi que ce soit.»

Quels ont été les moments marquants de votre adolescence ?

Loic : «J’ai aimé mon adolescence, faire ce que j’aimais, jouer au hockey. Mais comme moment marquant, c’est la COVID. C’était difficile de rester isolé, de pas voir nos amis.»

Loïc (Photo : Gracieuseté - Télé-Québec)

Mika : «Personnellement, la COVID, on dirait que je m’en rappelle juste pas. L’adolescence, je ne serais pas down de la revivre. Je n’avais pas un bon contrôle mentalement, j’étais un peu partout en même temps, je ne savais pas qui j’étais. Je pensais vraiment trop tout le temps.

Quand j’ai découvert le snowboard, c’est un des événements marquants. C’est vraiment quelque chose qui m’a poussé…une issue, une place où je pouvais ne pas penser. Cette adrénaline-là a fait en sorte que je pensais juste… pas.» 

Émy : «J’ai pas vraiment aimé mon secondaire et mon adolescence. Ce qui m’a marqué, c’est vraiment mes deux années à De Mortagne [à Boucherville], qui ont été vraiment difficiles, qui ont changé tout mon parcours. De savoir ce que je veux faire, ce que j’aime et qui je suis, c’est ça mon adolescence.»

Aujourd’hui, ils sont tous trois âgés de 17 ans – bientôt 18. Émy étudie en Technique d’éducation à l’enfance au cégep Édouard-Montpetit, Loïc en Sciences de la nature au cégep André-Laurendeau et Mika en Art et technologie des médias – profil cinéma, au cégep de Jonquière.

La série est diffusée sur Télé-Québec.


À projet unique, défis uniques 

La réalisatrice Marisol Aubé été attirée par le caractère unique d’Être ado. 

Le projet de suivre 10 jeunes à travers le Québec, et ce, sur une période de cinq ans, venait avec son lot de défis, à commencer par celui d’en définir le format. 

«On ne savait pas si ça allait être un documentaire unique,12 ou 24 épisodes, un portrait par épisode… Et la pandémie est arrivée. On s’est dit qu’on ne ferait pas 12 portraits avec la pandémie qui arrive 12 fois!» lance-t-elle.
L’arrivée de Télé-Québec comme diffuseur a permis de définir que la série documentaire se déploierait en 12 épisodes.  «J’ai pu commencer mon casse-tête et visionner tous les jours de tournage qu’on avait faits, et commencer à faire la structure de chacun des épisodes.»

Une équipe au Saguenay était en charge des journées de tournage mettant en vedette Rachel-Andrée et Jean-Émilien. 

«C’était un défi de garder le contact avec les ados, malgré ce qui se passe dans leur vie, malgré que ça leur tente moins, que l’un a une job, l’autre un tournoi de hockey, un pour qui son dimanche est sa seule journée de congé et qu’il aimerait mieux ne pas tourner», décrit-elle.

Malgré les embûches, la réalisatrice retient surtout de ce tournage le «privilège immense d’être dans leur vie et de capter tout ça».