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Justice

Tribunal spécialisé en violence conjugale et sexuelle : une grosse machine à mettre en place

le mardi 14 février 2023
Modifié à 15 h 35 min le 14 février 2023
Par Mario Pitre

mpitre@gravitemedia.com

(Photo d'archives)

Annoncé le 25 mars 2022 par le ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette, l’implantation du projet pilote de tribunal spécialisé en violence sexuelle et conjugale commence à prendre forme à Salaberry-de-Valleyfield et requiert la contribution de plusieurs intervenants reliés au dossier.

Les dossiers de violence conjugale et sexuelle représentent environ 20% du volume de causes entendues dans le district judiciaire de Beauharnois, soit entre 1000 et 1200 dossiers annuellement.

La mise en place de ce projet pilote vise à ce que les victimes puissent compter sur le soutien et l'accompagnement d'intervenants spécialisés, issus tant du milieu judiciaire que de divers organismes locaux, et ce, avant, durant et après le processus judiciaire.

Gros chantier

« On parle d’un gros chantier qui implique différents intervenants et différentes réalités, note le procureur en chef du Bureau de l’Ouest du Québec, Me Pierre-Olivier Gagnon. On est à changer des façons de faire; ça avance et les gens sont impliqués. »

Le procureur en chef du Bureau de l’Ouest du Québec, Me Pierre-Olivier Gagnon, en compagnie de Me Mariève Rondeau-Desjardins, procureur en chef adjointe. (Photo - Mario Pitre)

Quand celui-ci parle des gens, il parle d’une part des intervenants reliés au comité socio-judiciaire du projet : procureurs, le Centre d’aide aux victimes d’actes criminels (CAVAC), les corps policiers, le greffe, les avocats du privé et de l’Aide juridique, de même que la juge Marie-Chantal Doucet, désignée au dossier.

Depuis les derniers mois, ce comité a notamment travaillé à mettre en place un horaire spécial pour le traitement des dossiers de violence conjugale et sexuelle auquel tous les intervenants se conforment.

« Par exemple, lorsque des policiers procèdent à une arrestation avec promesses de comparution, ils ont été incités à fixer ces comparutions le mercredi, explique Me Gagnon. Ainsi, depuis quelques semaines, les mercredis sont consacrés spécifiquement aux dossiers de violence conjugale.»

Aide aux victimes

Pour les victimes, ce tribunal spécialisé pourra donc assurer un soutien « vertical», explique la directrice du CAVAC pour la Montérégie, Catherine Cartier, en faisant en sorte, entre autres, qu’elles puissent être suivies par un même procureur tout au long des procédures.

« L’objectif est de soutenir les victimes du début à la fin du parcours judiciaire », rappelle Mme Cartier, constatant elle aussi le défi que représente l’intégration de plusieurs services. 

Catherine Cartier, directrice générale du CAVAC pour la Montérégie. (Photo - Mario Pitre)

Au CAVAC, quatre intervenantes socio-judiciaires de liaison ont pu être embauchées au bureau de Valleyfield. Au terme d’un processus de formation, celles-ci ont été en mesure d’accompagner une quinzaine de victimes jusqu’à présent et de produire des rapports remis aux procureurs au dossier. 

À la Direction des Poursuites Criminelles et Pénales (DPCP), le projet a aussi permis l’arrivée de 4 nouveaux procureurs dédiés aux dossiers de violence conjugale. « On a eu la chance de combler ces postes avec des gens qui avaient un réel intérêt pour ce type de cause », indique Pierre-Olivier Gagnon.

Pour la procureure-chef-adjointe Mariève Rondeau-Desjardins, l’arrivée de ces nouvelles ressources a déjà permis d’accentuer l’accompagnement des victimes au cours des derniers mois.

Une autre facette du projet pilote visera l’intégration des différents organismes communautaires de la région associés à la problématique de violence conjugale et sexuelle; un élément qui a d’ailleurs justifié l’implantation du projet pilote au palais de justice de Valleyfield.

Pour le procureur en chef Pierre-Olivier Gagnon, il est possible de croire que ce tribunal spécialisé puisse être pleinement fonctionnel à la fin de 2024. « Je suis convaincu que toute cette démarche sera bénéfique autant pour les victimes que pour le fonctionnement de l’appareil judiciaire », conclut-il. 

Des projets pilotes comme celui-ci sont aussi en implantation à Granby, Drummondville, La Tuque, Laval, Sherbrooke, Lac-Mégantic, Sept-Îles et Montmagny. D’ici 5 ans, de nouveaux projets pourraient aussi voir le jour dans d’autres districts judiciaires de la Montérégie et de la province.